Origine et histoire du Château de Maisons-Laffitte
Le château de Maisons‑Laffitte, situé à Maisons‑Laffitte dans les Yvelines, est un chef‑d'œuvre de l'architecture civile du XVIIe siècle, associé au nom de François Mansart et marquant la transition entre la Renaissance tardive et le classicisme. Vers 1630, René de Longueil charge Mansart de construire une demeure à Maisons‑sur‑Seine; le château est achevé autour de 1650 et inauguré en 1651 en présence de Louis XIV et d'Anne d'Autriche. L'attribution à Mansart repose sur des témoignages contemporains, sur un paiement enregistré en 1657 et sur les écrits de Charles Perrault, malgré l'absence d'un contrat formel et l'existence d'anecdotes critiques telles que le pamphlet «La Mansarade». La longue histoire du domaine est liée à la famille de Longueil, propriétaire depuis 1390, qui agrandit et transforme la seigneurie pour en faire une résidence apte à recevoir le roi; la terre est érigée en marquisat en 1658. Après des transmissions familiales et des phases d'entretien et d'abandon, le domaine passe en 1777 au comte d'Artois, qui entreprend des remaniements intérieurs avec l'architecte François‑Joseph Bélanger mais doit interrompre les travaux faute de moyens. Saisi pendant la Révolution, le domaine est vendu comme bien national en 1798, puis acquis successivement au XIXe siècle par le maréchal Lannes en 1804 et par le banquier Jacques Laffitte en 1818, lequel morcelle le parc et fait disparaître les grandes écuries; divers propriétaires privent encore le site de certaines parties de son parc avant que l'État ne l'achète en 1905 pour le sauver de la démolition. Le château est ouvert au public dès 1912, classé Monument historique en 1914 et géré aujourd'hui par le Centre des monuments nationaux. Implanté entre la Seine et la forêt de Saint‑Germain, l'édifice est la pièce maîtresse d'une composition paysagère fondée sur une grande perspective; il s'élève sur une plateforme isolée par un fossé accessible par deux ponts et s'ouvre sur une succession de terrasses, parterres et bassins descendant vers le fleuve. À l'origine, le domaine comprenait un petit parc d'environ trente‑trois hectares et un grand parc d'environ trois cents hectares, desservis par des allées et des entrées monumentales avec pavillons et ha‑has. L'ensemble se structure autour d'une cour d'honneur fermée par un corps de logis flanqué de deux courtes ailes; la façade joue d'avant‑corps simulés et d'un décor sobre mais raffiné inspiré des œuvres de Pierre Lescot et de Philibert Delorme. Les grandes écuries, conçues selon un parti monumental annonçant Versailles et Chantilly, ont été largement détruites au XIXe siècle, mais des vestiges subsistent et sont protégés, de même que le mur d'enceinte attribué à Mansart. Le vestibule d'honneur illustre la culture architecturale de Mansart, mêlant entablement inspiré du palais Farnèse et colonnes doriques empruntées aux Tuileries; les dessus de porte sculptés par Gilles Guérin sur des dessins de Jacques Sarrazin figurent des divinités associées aux éléments et évoquent la fonction des accès. L'escalier d'honneur, réalisé par stéréotomie, combine audace technique et effet monumental en passant d'un plan carré en partie basse à une coupole ovale et en donnant l'impression que ses dernières volées sont suspendues. Le château conserve quatre grands appartements organisés selon un schéma d'antichambre, chambre de parade, petites chambres et cabinets, l'appartement du roi ayant mieux préservé sa distribution et sa riche décoration de peintures et de sculptures; d'autres intérieurs portent les marques d'interventions ultérieures, notamment celles de Bélanger pour le comte d'Artois et des remaniements du XIXe siècle. Parmi les pièces remarquables figurent la cheminée sculptée par Gilles Guérin dans l'appartement de René de Longueil, des coupoles, lambris et glaces vénitiennes conservés dans certains cabinets, ainsi que des petits appartements qui conservent parfois leur apparence du XVIIe siècle; l'appartement de Voltaire, occupé en 1723, a perdu son décor dans l'incendie de la même année, tandis que l'appartement dit de La Fayette a gardé ses lambris d'origine. Le château abrite des collections de peintures, sculptures et mobilier d'époques variées, comprenant des pièces liées au comte d'Artois et des éléments provenant des Tuileries, et il a servi de modèle et d'inspiration pour des réalisations architecturales ultérieures telles que Vaux‑le‑Vicomte et Versailles. Les abords, certains murs et vestiges du parc, ainsi que des éléments décoratifs bénéficient de protections au titre des monuments historiques, et le site reste un témoignage majeur de l'architecture classique française et de l'art de vivre du Grand Siècle.