Origine et histoire du Château de Menthon
Le château de Menthon, dit aussi château de Menthon‑Saint‑Bernard, est une ancienne maison forte du Xe siècle, remaniée à plusieurs reprises et restaurée au XIXe siècle dans un style néogothique. Il se dresse sur la commune de Menthon‑Saint‑Bernard, en Haute‑Savoie, Auvergne‑Rhône‑Alpes, dominant le lac d'Annecy depuis un rocher de 200 mètres et la réserve du Roc de Chère, entre les dents de Lanfon et le mont Veyrier. Établi en éperon sur un cône rocheux à 600 mètres d'altitude, il surveillait à l'origine la route de Bluffy à Menthon. Les premiers ouvrages datent du Xe siècle, vers 923 : une simple forteresse en bois qui contrôlait la voie romaine et le lac; les bâtiments actuels ont été édifiés entre les XIIIe et XIXe siècles. Les trois grandes tours en pierre remontent au Moyen Âge; la famille de Menthon, connue depuis la fin du XIIe siècle, fit construire ces tours et le château est mentionné pour la première fois en 1249. Bernard de Menthon y serait né en 1008 et fonda ensuite les hospices du Grand et du Petit‑Saint‑Bernard. Au XIIIe siècle la famille, d'origine peut‑être bourguignonne, prit de l'importance féodale. En 1261 Thomas de Menthon obtint de l'évêque de Genève l'investiture d'une foire annuelle. Nicod de Menthon, au XVe siècle, fut ambassadeur en France du duc Amédée de Savoie, gouverneur de Nice et amiral d'une flotte envoyée par le concile de Bâle à Constantinople. À la Renaissance la forteresse se transforma en somptueuse résidence : des appartements remplacèrent les chemins de ronde et la famille enrichit son mobilier. Au XVIIIe siècle furent ajoutées des pièces spacieuses et lumineuses donnant sur le lac, dont une salle à manger et un grand salon d'environ 100 m2 ouverts sur le panorama. Le 7 mai 1793, un groupe d'insurgés mené par Maurice Genand vint au château chercher des armes et des munitions, notamment deux petits canons dits « campagnardes ». Le domaine fut acquis en 1809 par François Ruphy de Menthon de Lornay. Au XIXe siècle, et plus particulièrement entre 1860 et 1890, le comte René de Menthon procéda à des consolidations, éleva des murs, ajouta des tourelles et créa la galerie à colombages de la cour intérieure, selon un esprit voisin de Viollet‑le‑Duc. D'autres travaux, de la fin du XIXe siècle jusqu'à la Première Guerre mondiale, donnèrent au château son aspect actuel dans un goût marqué par les châteaux de Louis II de Bavière, avec création de tourelles et remaniement intérieur. Le château fit l'objet d'une inscription au titre des monuments historiques par arrêté du 21 février 1989. Il est ouvert au public de mai à septembre; en été une troupe de comédiens anime la visite et le site accueille près de 40 000 visiteurs par an; il est aussi possible d'y louer des salles pour réceptions, séminaires et mariages jusqu'à 120 personnes. L'édifice comporte une enceinte élevée renforcée par des braies et, autour d'une petite cour intérieure, plusieurs corps de logis adossés au rempart. Au point culminant, au nord‑est, se dresse le donjon appelé « tour des armes », bâtiment quadrangulaire irrégulier de 8 mètres de côté flanqué d'une tourelle circulaire contenant un escalier; une autre tour, dominant l'entrée au sud‑ouest, mesure 9 × 12 mètres. L'ensemble a été profondément remanié aux XIVe et XVe siècles, mais subsistent des maçonneries du XIIIe siècle et peut‑être du XIIe siècle. L'enceinte, percée de meurtrières et reliée au donjon par des courtines, s'ouvre par une porte surmontée d'un mâchicoulis; on pénètre ensuite par une porte du XVe siècle ferrée, percée d'un judas grillagé et équipée d'un marteau. Le château comprend 105 pièces réparties sur quatre niveaux et plusieurs centaines de mètres carrés; on y visite des pièces meublées remarquables comme la chambre de la comtesse, les anciennes cuisines du XIIIe siècle et la grande salle décorée de tableaux et de meubles du XVIe au XIXe siècle, ainsi que quelques meubles de style Louis XIII et Louis XIV et des tapisseries des Gobelins (1730) et d'Aubusson. Il abrite une bibliothèque de plus de 12 000 ouvrages antérieurs à 1800, comprenant incunables, manuscrits médiévaux enluminés sur parchemin, peau de mouton ou de chèvre, et de nombreux ouvrages des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles; elle contient notamment une des rares éditions complètes de l'Encyclopédie de Diderot. Une chapelle de style roman, richement décorée, complète l'ensemble. Le château de Menthon est également cité comme source d'inspiration pour le château de La Belle au Bois Dormant de Walt Disney, et le château de Neuschwanstein est souvent évoqué pour ses similitudes. François de Menthon, oncle des copropriétaires actuels, fut juriste, résistant, représentant la France comme procureur au procès de Nuremberg, promoteur de la construction européenne et ministre de la Justice sous de Gaulle. En 2008 des manifestations commémoratives furent organisées pour le millénaire supposé de la mort de Bernard de Menthon.