Origine et histoire du Château de Montfort-sur-Risle
Le château de Montfort-sur-Risle, ancien château fort du XIe siècle, se dresse en ruines sur la commune de Montfort-sur-Risle dans l'Eure, en Normandie. Les vestiges, accessibles librement tout au long de l'année, sont inscrits au titre des monuments historiques. Des travaux de restauration ont été menés par des bénévoles de l'association Chantiers Histoire et Architecture Médiévales entre 2009 et 2011, puis entre 2016 et 2017. Implanté sur un éperon rocheux dominant l'église Saint‑Pierre‑et‑Saint‑Paul, le site culmine à près de 100 mètres d'altitude et couvre 4,6 hectares, avec une profondeur d'environ 280 mètres pour une largeur de 165 mètres. Cette position permettait de contrôler les voies terrestres reliant Pont‑Audemer à Brionne et Lieurey à Montfort, ainsi qu'un des rares points de franchissement de la Risle aux XIe et XIIe siècles.
Les premières mentions signalent Torsten de Bassebourg comme possesseur vers 980; son fils Hugues Ier fit édifier la forteresse de pierre. Hugues Ier trouva la mort en 1039 lors d'un combat à Plasnes; son descendant Hugues II, connétable du duc Guillaume, participa notamment à la bataille de Mortemer en 1054 et à l'expédition de 1066, recevant en récompense des biens en Angleterre et la gestion de l'honneur d'Haugley. Ses fils, Hugues III et Robert Ier, reçurent respectivement les terres anglaises et normandes; Hugues III mourut en Terre sainte et certaines possessions anglaises furent réunies à Robert Ier. Robert Ier se distingua au service de Guillaume le Roux, participa à plusieurs combats puis, privé de postérité, laissa le domaine à son neveu Hugues IV. Hugues IV prit part à la conspiration de La Croix‑Saint‑Leufroy en 1122, ce qui provoqua le siège du château par le roi Henri Ier; la forteresse fut prise puis remise à Galéran IV de Meulan, qui y resta jusqu'en 1135 et y fit des réparations.
Robert II reprit le château en 1153; il détenait plusieurs honneurs et un nombre important de chevaliers dépendants de ses fiefs. Hugues V lui succéda et intervient dans les sources relatives au paiement d'une rançon en 1195; après la prise de Château‑Gaillard, Montfort s'inscrivit dans la seconde ligne de défense du duché. Vers 1203 Hugues V disparaît des textes et le château passa à Hugues de Gournay, qui livra Montfort aux troupes de Philippe Auguste; la forteresse fut partiellement détruite lors des conflits entre les couronnes anglaise et française, les tours et murailles ayant été démantelées et le donjon mutilé. Les envoyés de Philippe Auguste constatèrent ensuite que l'ouvrage était laissé en ruines.
Architecturalement, le site comprend au nord un ouvrage avancé appelé le Grand Ber, entouré d'un large fossé et comparable à une basse‑cour, et, au centre, les vestiges d'une enceinte en pierre flanquée de sept tours au nord et au sud. La haute cour, d'environ 3 600 m2, est protégée par quatre tours d'angle, une tour‑porte dite Saint‑Nicolas et trois tours semi‑circulaires. Le donjon, de plan rectangulaire (18 × 16 m), n'offre que le premier niveau ; il présente des contreforts plats et est partiellement entouré d'une chemise qui l'isole du reste de la haute cour. Les maçonneries associent silex à parements et blocaille, tandis que les arêtes et soubassements témoignent d'un appareillage soigné en pierre calcaire ; à l'arrière du donjon subsiste un mur en opus spicatum. Des sondages menés en 1977 et 1978 ont relevé la poterne de la tour‑porte ; des fossés ceinturent l'ensemble avec des profondeurs pouvant atteindre 10 mètres et des largeurs jusqu'à 39 mètres. Les murs de courtine, d'environ 2 mètres d'épaisseur et atteignant une hauteur maximale de 5 mètres, sont partiellement masqués par des remblais.
Les études et les campagnes menées par l'association C.H.A.M. ont mis en évidence au moins deux phases de construction : des éléments défensifs primitifs comprenant archères et points de tir, puis des renforcements consistant en rehaussement des murs, ajout d'un glacis et implantation de tours d'angle et d'une tour éperon, transformations attribuées dans les sources aux interventions d'Hugues IV. Ces campagnes ont aussi permis de réparer et de consolider plusieurs ouvrages. La dévégétalisation engagée par l'association Montfort Culture et Patrimoine depuis 2003 a amélioré la lisibilité du site ; cette association a aménagé un préau d'accueil, des aires de pique‑nique et un Jardin des Simples, et organise des médiévales le premier week‑end de septembre. Une campagne de fouilles archéologiques serait nécessaire pour préciser encore les origines et les phases anciennes évoquées par les auteurs. Les ruines du château fort sont inscrites au titre des monuments historiques par arrêté du 13 septembre 1937. En 1923, l'érudit Robert Duquesne constatait le souhait des habitants que le vieux château devienne propriété communale pour être aménagé et attirer des visiteurs.