Origine et histoire du Château de Montjeu
Le château de Montjeu se situe sur la commune de Broye, en Saône-et-Loire, dans un parc boisé parsemé d'étangs et de jardins, sur la montagne qui domine Autun. Le logis central est encadré de deux ailes en retour d'équerre et flanqué aux angles de quatre pavillons carrés; des pierres appareillées soulignent les angles et l'encadrement des fenêtres. Au centre du logis, une porte à bossages surmontée d'un fronton brisé ouvre sur la cour. Des fossés entourent l'ensemble et des canonnières ménagées dans les pavillons proches de l'entrée évoquent l'ancien caractère défensif. L'aile sud abrite une chapelle ornée de boiseries et de peintures; au nord, les communs forment un site imposant autour d'une cour, avec portail, abreuvoir monumental et pigeonnier. À l'est, une allée axiale descend vers un bassin rond qui domine un vaste horizon de bois et de montagnes; les parterres, organisés en compartiments de broderies avec bassins, sont encadrés par des terrasses plantées d'arbres en quinconce. À l'ouest, un parterre central autour d'un bassin, flanqué de salles de verdure, compose un jardin fermé par une grille. En 1807, Aubin-Louis Millin décrivait le parc comme étant de quatre lieues de tour, entouré de murailles, et mentionnait un étang alimenté par des sources élevées qui fournissait l'eau aux moulins d'Autun. Le château est protégé au titre des monuments historiques : inscription le 9 décembre 1929 et classement le 19 avril 1958. Propriété privée, il n'est pas ouvert au public.
Au Moyen Âge, les familles de Riveau et d'Ostun se succèdent à la tête de la seigneurie. En 1586, la baronnie de Montjeu-en-Montagne est acquise par le président Pierre Jeannin, originaire d'Autun, conseiller d'Henri IV et plus tard surintendant des Finances sous la minorité de Louis XIII. En 1606, Pierre Jeannin entreprend la construction du château et justifie son choix de site désert en déclarant : « Je serai toujours assez loin des méchants, et mes amis sauront bien me trouver ». À partir de 1623, son gendre Pierre de Castille fait édifier les grands escaliers du parc et décore la chapelle. La baronnie est élevée en marquisat en 1665 et, dans la seconde moitié du XVIIe siècle, Nicolas Jeannin de Castille fait bâtir les communs sud sur le modèle du nord et aménage les jardins à la française. Selon Charles-Athanase Walckenaer, Françoise de Rabutin-Chantal fréquente le château, qui en juillet 1656 est le lieu de sa première rencontre avec sa nièce Madame de Sévigné. En 1734, Voltaire assiste dans la chapelle à un mariage de la famille Jeannin de Castille; l'année suivante, un incendie endommage le corps de logis central. La veuve du président d'Aligre acquiert alors la propriété, remplace les ponts-levis par des ponts dormants et supprime le mur percé d'un portail monumental qui fermait la cour. Durant la seconde moitié du XVIIIe siècle, le domaine passe au petit-fils des précédents, Louis-Michel Lepeletier de Saint-Fargeau, puis, au XIXe siècle, par mariage, aux Talleyrand; en 1893 il échoit à la princesse de Ligne.
En 1939, Roger Louis Demon, industriel du bois, achète le domaine alors en mauvais état; lui et son épouse, Anne-Marie Lyon, entreprennent une importante campagne de restauration. Ils remettent en état les chemins et la route principale, restituent les jardins à la française selon des plans de Lenôtre conservés au château, replantent et nettoient les bois en conservant la futaie « Rageot », et reconstruisent le mur d'enceinte long d'environ sept kilomètres qui ceint le parc de 750 hectares. Ils restaurent également le potager en contrebas des parterres et remettent en service les fermes et les dépendances, dont les communs pourvus d'écuries, pigeonnier et logements. Après la guerre, M. Demon obtient l'inscription aux Monuments historiques; en 1948 la ferme principale reçoit un matériel de traite électrique et en 1950 les toitures du château sont refaites à l'ancienne selon les prescriptions de l'administration des monuments historiques. Les travaux d'aménagement intérieur visent à moderniser le confort tout en respectant l'architecture; la chasse du domaine devient réputée et les étangs de la Toison fournissent l'eau d'Autun et une pêche importante. Pour le travail accompli, Mme Demon reçoit les Palmes académiques et le Mérite agricole, et M. Demon, qui a caché en 1944 une famille juive poursuivie par les nazis, est reconnu « Juste parmi les Nations » par Yad Vashem. Après l'incendie de 1963 qui détruit l'intérieur du corps de logis central et endommage l'aile nord, le docteur Willy Manchot fait réparer le château. À la fin des années 1980, le milliardaire franco-britannique Sir Jimmy Goldsmith acquiert la propriété, la ferme au public et mène d'importants travaux de restauration intérieure et extérieure, notamment sur les communs, les pavillons et les jardins et bassins extérieurs. Les restaurations aboutissent à un ensemble spectaculaire, visible notamment sur des vues aériennes, et l'on prétend que le parc clos serait le plus vaste d'Europe avec 704 hectares enfermés par 10,6 kilomètres de murs. Bibliographie et sources mentionnent notamment Ernest de Ganay, Le château et les jardins de Montjeu, 1925, ainsi que divers portails régionaux et ceux des monuments historiques.