Origine et histoire du Château de Montlaur
Le château dit château de Montlaur, aussi appelé château d'Aubenas, se dresse à Aubenas, dans le département de l'Ardèche, en région Auvergne-Rhône-Alpes. Classé monument historique depuis le 2 mars 1943, il a été profondément transformé par les six familles seigneuriales qui l'ont occupé du XIIe siècle à la Révolution et, après sept années de travaux, est devenu en 2024 un centre d'art contemporain. Installé au point culminant de la ville, place du Château, il domine la moyenne vallée de l'Ardèche depuis un promontoire calcaire qui offrait autrefois un poste de guet et une position stratégique entre les pentes granitiques des Cévennes au nord et à l'ouest et le plateau calcaire méditerranéen au sud et à l'est. La voie reliant Montélimar au Puy-en-Velay, qui passe au pied du rocher, faisait de la ville un carrefour entre différents types d'agriculture et de marchés ; ces échanges ont favorisé sa prospérité dès le XIIIe siècle. Le château, voisin de la maison Delichères au sud et offrant au nord une vue sur le quartier du Pont-d'Aubenas, surplombe la place où se tient le marché du samedi.
L'histoire seigneuriale s'étend du XIIe siècle à la Révolution : la famille de Montlaur, qui règne de 1084 à 1441, construit le donjon, le mur d'enceinte et les deux tours rondes et ceint l'ensemble de fossés ; viennent ensuite les Maubec, puis les Modène, les Ornano, les Harcourt-Lorraine et enfin les Vogüé qui conservent la seigneurie jusqu'en 1792. L'implantation initiale repose sur une tour de garde placée au carrefour de la route entre le Puy-en-Velay et Montélimar ; la position suscite des rivalités dès le Ve siècle entre les évêchés de Viviers et du Puy, et c'est au XIe siècle que Pons Ier de Montlaur reçoit la seigneurie. Sous les Montlaur, le donjon atteint 26,50 mètres et la terrasse crénelée domine le paysage ; l'enceinte a alors à peu près l'emprise qu'on lui connaît aujourd'hui et l'accès se faisait par un pont-levis à l'ouest au-dessus du fossé, la façade sud étant protégée par une vaste basse-cour.
De 1441 à 1551, les Maubec aménagent notamment la tour à fenêtres à meneaux dite tour des Maubec, tandis que les Modène, au XVIe siècle, ajoutent dans la cour intérieure une loggia à l'italienne sur trois niveaux d'arcades, marquant la transition du château féodal vers une résidence de plaisance. Les Ornano, au début du XVIIe siècle, complètent à la fois l'architecture défensive et le confort : échauguettes du donjon, mâchicoulis, toitures vernissées, porte à bossage de la tour sud-ouest, boiseries et plafonds « à la française » dans certaines salles. Par mariage et succession la seigneurie revient ensuite aux Harcourt puis aux Vogüé ; Charles-François de Vogüé commande des aménagements qui fixent l'entrée du château par des portes jumelles et une double volée monumentale, et fait poser en 1768 des boiseries de style Louis XV ou Louis XVI et une rampe de ferronnerie remarquable pour l'escalier d'honneur.
Après la Révolution le château est déclaré bien national et pillé le 13 octobre 1792 ; la ville d'Aubenas le protège et y installe la mairie en 1810. Le bâtiment accueille ensuite divers services, dont un tribunal de commerce et le pesage des cocons, avant que la mairie ne quitte les lieux pour l'ancienne gendarmerie en 1985.
Sur le plan architectural, le donjon à échauguettes, de la fin du XIIe siècle, est un quadrilatère haut de 26,50 mètres pour 7 mètres de côté, aux murs épais de deux mètres ; il est pourvu d'échauguettes d'angle à toit en coupole, d'une terrasse munie de rigoles pour l'écoulement des eaux et de créneaux, et ses toitures vernissées à motifs de losanges datent du XVIIe siècle. L'enceinte, dont la courtine pourvue de mâchicoulis rappelle la structure du XIIIe siècle, est flanquée sur la façade sud de deux tours rondes en poivrière du XIVe siècle ; les fenêtres à meneaux et la porte à bossage de la tour sud-ouest appartiennent également aux aménagements des XVIe–XVIIe siècles. La cour intérieure présente la loggia à l'italienne élevée par les Modène et la tour des Maubec, tour gothique de quatre étages percée de fenêtres à meneaux et abritant un escalier à vis, qui permettait l'accès aux niveaux avant la création de l'escalier monumental. Cet escalier monumental, établi au XVIIIe siècle dans l'angle nord-ouest, repose sur une voûte sarrasine et conserve une rampe de style Louis XV ; son plafond, naguère dissimulé sous un plâtre du même siècle, laisse aujourd'hui apparaître un plafond à la française très détérioré par l'humidité.
Au rez-de-chaussée, le hall d'entrée, percé au XVIIIe siècle dans l'ancienne salle de garde, est décoré de blasons retraçant l'histoire de la ville ; la cour est entourée d'une galerie d'arcades, avec en angle une tourelle d'escalier du XVe siècle et, au fond, un escalier d'honneur du XVIIIe siècle, tandis que deux salles servent aujourd'hui d'espaces d'exposition. Le premier étage abrite des appartements et salons de style Louis XV et Louis XVI, dont un salon consacré aux mariages ; la plupart des meubles et lustres sont des copies, le château ayant été pillé après la Révolution. Le deuxième étage accueille des salles dédiées à la mémoire albenassienne et aux expositions d'artistes ardéchois.
Les travaux de restauration ont été menés en plusieurs phases : la saison 2017–2018 a permis la réfection de la façade sud, la reprise totale de la couverture du donjon et la restauration des huisseries, la deuxième phase à partir de septembre 2018 a concerné les trois autres façades, et la troisième phase, engagée en septembre 2019, visait l'aménagement du château en centre d'art contemporain, aboutissant à son ouverture en 2024.
