Origine et histoire du Château de Sainte-Hélène-sur-Isère
Le château de Sainte-Hélène-sur-Isère, anciennement appelé château de Sainte-Hélène-des-Millières, est un château fort du XIIIe siècle remanié au XVIIe siècle et siège de la seigneurie élevée au titre de baronnie ; il se situe sur la commune de Sainte-Hélène-sur-Isère, en Savoie, et est inscrit au titre des monuments historiques depuis le 17 mai 1940. Implanté au sud-est du bourg, le château de plaine domine la rivière Isère et se trouve au pied du Grand Arc. La première mention connue date du 9 octobre 1252, lorsque le comte de Savoie Amédée IV cite le site dans une donation faite à son frère Boniface de Savoie, archevêque de Cantorbéry. À cette époque il appartient à Pierre d'Aigueblanche, qui l'a fait construire et déclare le tenir en fief de Boniface le 7 septembre 1255 ; Boniface y meurt le 14 juillet 1270 et lègue ses biens à Pierre II d'Aigueblanche. Vers 1355 le château est vendu à Girard de Varax, puis, à la mort de celui-ci sans descendance, la seigneurie passe le 16 octobre 1358 à Jean de La Chambre, époux d'Agnès de Savoie-Achaïe. Jean III de La Chambre, seigneur en 1415 et vassal d'Amédée VIII, le refortifie, puis la succession se poursuit au sein de la maison de La Chambre avec Urbain (1419), Jean IV (avant 1429) et de nouveau Urbain qui rédige son testament en 1440 ; son fils Gaspard lui succède. Resté dans cette famille jusqu'en 1454, le domaine est alors transmis à Aymon de Seyssel, à l'origine de la branche La Chambre-Seyssel qui le conserve de 1454 à 1470 ; suivent Louis (mort en 1517), Charles, Philippe, puis Philibert, élevé au titre de baron, qui, ruiné, vend le château en 1607 à Jean-Baptiste de Locatel, originaire de Bergame. Le château, partiellement ruiné par les conflits opposant la France et la Savoie, est profondément restauré par Jean-Baptiste de Locatel, qui y meurt avec son épouse entre 1615 et 1617 ; leur fille Jeanne-Antoinette, après deux mariages, s'installe elle aussi au château. La succession se poursuit par Charles-Emmanuel, père de Sigismond et Hector, Sigismond reprenant ensuite le domaine et mourant en 1707, puis par Joseph-François et Joseph-François-Prosper ; ce dernier lègue le château en 1772 à sa femme Anne de Mellarède, mais le 1er juin 1772 il échoit finalement au neveu Joachim-Joseph d'Allinges-Coudrée. Sous la Révolution, Albitte fait arracher les tours au niveau des toits ; le château, vidé du marquis émigré, est vendu comme bien national et acheté avec la cure par Jean-François Portier. La famille d'Allinges retrouve ensuite la propriété, qui passe au XIXe siècle entre plusieurs mains, notamment celles de M. Donnet d'Albertville (1853), d'Ignace Foray (1856–1857), puis des familles Pépin, Ract-Brancaz, Combaz et Chenaval. Architectoniquement, l’ensemble forme une enceinte quadrangulaire sur laquelle s'appuient trois grands corps de logis à l'est, au nord et à l'ouest ; la face sud est fermée par un mur épais percé d'une unique porte voûtée donnant sur une cour profonde de 9 à 10 mètres. Trois tours rondes aux angles nord-ouest, sud-ouest et sud-est flanquent l'enceinte ; celle située à droite de la porte, coiffée d'un toit en poivrière et servant de donjon, a été arasée pendant la Révolution puis restituée seulement sur 8 mètres au-dessus du chemin de ronde, ce qui porte sa hauteur actuelle à 25 mètres pour un diamètre de 6 mètres. La tour nord-ouest comporte à chaque étage une chambre et un souterrain, comme la tour sud-ouest où l'on trouve une chambre dotée d'une cheminée Louis XIV ; la maçonnerie arrissée de la tour ronde permet de rattacher l'ensemble au XIIIe siècle. Le château a conservé des mâchicoulis, tandis que certains meneaux ont été obturés. Le corps de logis est, à l'est, un bâtiment de trois étages sur caves éclairé par grandes fenêtres à meneaux ; au rez-de-chaussée une pièce voûtée avec une grande cheminée correspond à l'ancienne cuisine, contiguë à une grande salle de 12 × 8 m au plafond à la française et ouverte par deux fenêtres, dont une sur la cour. Aux deux étages supérieurs, au-dessus de la cuisine, se succèdent une salle ornée d'un plafond à la française, une chambre voûtée et une salle centrale desservie par un escalier en vis à chaque niveau ; au-dessus de la grande salle du rez-de-chaussée se trouve une vaste salle de 10 × 7,50 m dotée d'un plafond à la française du XVe siècle éclairée par trois grandes fenêtres, et le dernier niveau abrite une troisième salle de 11 × 7,70 m. Le corps de logis nord renferme au rez-de-chaussée une salle voûtée de 7 × 5,50 m qui fut l'ancienne chapelle et servit d'église paroissiale au XIXe siècle avant la construction de l'église actuelle en 1865 ; le retable représentant la Vierge et l'Enfant entourés de saint Roch et saint Sébastien, provenant de cette chapelle, est déposé au musée des beaux-arts de Chambéry. À l'étage, une chambre orientée au nord, munie d'une cheminée et remaniée au XVIIe siècle, est présentée comme le lieu où Boniface de Savoie serait mort en 1270. Le corps de logis ouest, probablement restauré par Jean-Baptiste de Locatel, est un bâtiment d'un étage sur rez-de-chaussée dont les caves abritent une grande salle voûtée, dite « jardin d'hiver » du XVIIe siècle, communicante avec la tour nord-ouest ; à l'étage se situe une grande salle de 15 × 8 m à plafond à caissons qui a servi autrefois de mairie, et la cuisine de plain-pied, largement éclairée, présente des plafonds à la française. Une écurie datée de 1702, un jardin exposé au sud et une fontaine entre le corps de logis est et le donjon, s'écoulant dans un bassin, complètent le site ; le parcellaire figuré sur la mappe sarde signale aussi la présence d'un colombier, d'écuries avec cour, de jardins, de prés et de pâturages. Enfin, Édouard Herriot évoque, dans Lyon n'est plus, une porte de fer surmontée de trois fleurs de lys au seuil du jardin, qu'il considère comme exprimant « la grâce la plus fine de la Régence ».