Origine et histoire du Château de Salles-Curan
Le château, appelé Ancien château, est situé à Salles-Curan dans l'Aveyron. Son nom vient d'une ou plusieurs salles seigneuriales et il dépendait des comtes de Rodez. En 1227, Jean, fils du comte Hugues II, céda ses parts à ses frères Richard et Hugues, et le domaine se retrouva partagé entre plusieurs co-seigneurs. En 1237, Jean de Sévérac revendiqua un quart du château; la famille Guiral (ou Guiral-Paret), attestée depuis le XIIe siècle, et le seigneur de Lévézou figuraient parmi ces co-seigneurs. L'évêque de Rodez s'y installa progressivement après la guerre des Albigeois et, en 1237, acheta les parts des seigneurs de Sévérac et du Lévézou, devenant ainsi seul seigneur de Salles-Curan. Le premier évêque à se dire seigneur de Salles-Curan fut Vivian (1247-1274); l'évêque pouvait alors nommer bayle, juge et autres agents pour administrer et rendre justice. En 1429 un conflit opposa deux évêques de Rodez : Guillaume de La Tour d'Oliergues, choisi par le pape Martin V le 16 mars 1429, et Pierre d'Estaing, élu par le chapitre vers la fin de 1428; ce différend dura jusqu'en 1432. Pendant cette période, Guillaume de La Tour s'établit à Salles-Curan et le chapitre fit du village l'un des sièges de son administration, favorisant ainsi son développement. De retour du concile de Bâle, auquel il participa depuis 1433, Guillaume de La Tour décida de faire construire un château ; le contrat de construction fut signé le 15 septembre 1442 avec le maître maçon Pierre Combettes de Saint-Beauzély. Le chantier prévoyait un château à trois portes et trois tours, avec fenêtres, portes et lucarnes ; Guillaume adossa cet édifice à l'enceinte du village, composée de maisons fortes et de fossés. Ses armes sont sculptées sur le blason au-dessus du portail principal, où la herse est figurée en position haute. Guillaume et ses successeurs résidèrent fréquemment au château ; les armes de François d'Estaing, surmontées d'une rose, figurent encore sur le manteau d'une cheminée intérieure. Pendant les guerres de religion, Salles-Curan devint une place forte de l'orthodoxie catholique face à Millau, gagné au protestantisme : Antoine de Vezins y tint une compagnie de deux cents hommes d'armes en 1572, et les bénédictines de l'Arpajonie de Millau trouvèrent refuge au château en 1601 après la destruction de leur couvent par les calvinistes. Plusieurs évêques de la famille Corneillan y séjournèrent ; Bernardin de Corneillan y mourut en 1645, Jean-Armand de Tourouvre en 1733, et Charles de Grimaldi y séjourna entre 1746 et 1770. Jérôme Champion de Cicé, jugeant le château inhabitable neuf mois de l'année, obtint l'autorisation royale de le démolir en 1779, mais aucun entrepreneur ne prit en charge l'opération. Le château fut vendu comme Bien national en 1795 et adjugé à Pierre Girard et Guillaume Capelle. À partir de 1842, Jean-François Teysseyre commença à racheter des parties du château ; en 1857, avec son fils Émile, ils possédèrent l'ensemble des bâtiments. Après le décès d'Émile, la propriété fut partagée par jugement du tribunal civil de Millau entre sa veuve Irma, sa fille Louise et son fils Paul, qui vendit immédiatement sa part. En 1922, l'abbé Delery acheta une partie de l'aile Est à Louise Teysseyre pour y établir une école, tandis que l'aile Nord fut vendue à la famille Bouviala/Gary pour y créer une auberge, désignée dans les actes de l'époque comme la "Gendarmerie". L'aile Nord abrita l'Hostellerie du Lévézou, un hôtel-restaurant régional réputé jusqu'à sa fermeture en 2012 ; sous la direction du chef David Bouviala, l'établissement obtint jusqu'à deux étoiles au Guide Michelin et accueillit de nombreuses personnalités. De 2014 à 2018, des chambres d'hôtes furent exploitées dans cette aile; l'aile Est abrita l'école privée catholique de Salles-Curan de 1922 à 2017. Le porche, la herse et l'oculus surmontant le porche ont été classés au titre des monuments historiques en 1928.