Origine et histoire du Château du Plessis-Bourré
Le château du Plessis-Bourré se situe à Écuillé, en Maine-et-Loire, à une quinzaine de kilomètres au nord d’Angers, entre les vallées de la Mayenne et de la Sarthe. Peu modifié extérieurement depuis sa construction il y a plus de cinq siècles, il figure parmi les châteaux de la Loire les mieux conservés et est fréquemment sollicité pour des tournages. Au XIVe siècle, le Plessis-le-Vent appartenait à Roberte de La Haye et à son mari Geoffroy III des Roches, puis suivit le sort de la châtellenie de Longué et de la seigneurie de Jarzé. Au XVe siècle la seigneurie passa aux Sainte-Maure de Montgauger, puis Charles Ier de Sainte-Maure vendit l’ensemble à Jean Bourré. Jean Bourré (1424-1506), grand argentier et principal confident de Louis XI, acquit le domaine en 1462 et fit édifier le château actuel entre 1468 et 1473 sur l’emplacement d’un ancien manoir; son épouse Marguerite de Feschal veilla aux travaux depuis le château de Vaux lors de ses absences. Son fils cadet Charles Bourré « le Jeune » (1483-1534) fut chambellan du roi et se fit connaître comme seigneur de Vaux et de Beaumont. Le château reçut la visite de Louis XI le 17 avril 1473, lors d’un pèlerinage à Notre-Dame de Béhuard, et celle de Charles VIII le 10 juin 1487, accompagné d’Anne de Beaujeu. Par alliances et successions, la propriété passa aux du Plessis de la Roche-Pichemer puis aux du Plessis de Jarzé, comtes du Plessis-Bourré et marquis de Jarzé ; parmi leurs descendants se distingue René du Plessis « le Beau Jarzé » (1613-1676). Le domaine fut ensuite lié à la famille Savary de Brèves, dont les aliénations commencèrent en 1730, puis acquis le 18 novembre 1751 par la famille de La Planche de Ruillé pour 195 000 livres. Jean-Guillaume, comte de Ruillé, né en 1739 et député de la noblesse aux États généraux, fut mis à mort en janvier 1794 à Angers; son gendre Jean-Joseph de Terves mourut au château en 1835. Menacé de démantèlement au milieu du XIXe siècle, le Plessis-Bourré fut racheté en 1851 par le notaire Victor Avenant, qui préserva le domaine de quelque 440 hectares, dont 88 de bois. En 1911 Henri Vaïsse acquit le château; à son décès il le légua à son neveu François Reille-Soult de Dalmatie, qui l’ouvrit au public et créa un circuit de visite. Le château est classé au titre des monuments historiques, avec la pièce d’eau, les douves et les avenues, par arrêté du 1er juin 1931. La gestion resta dans la même famille : en 1978 Antoinette de Croix et son époux Bruno de Ferrières de Sauvebœuf reprirent l’exploitation, et depuis 1985 la propriété est gérée par la SCI du Plessis-Bourré, dirigée par Jean-François Reille-Soult de Dalmatie et Aymeric d'Anthenaise. L’aménagement paysager crée l’illusion que le château émerge des eaux qui l’entourent. Forteresse dotée de larges douves franchies par un pont de quarante-quatre mètres, le bâtiment combine une architecture défensive — donjon, double pont-levis et chemin de ronde — et les éléments d’une résidence d’agrément. On y reconnaît un caractère de « château de transition » : la Renaissance se manifeste par de hautes fenêtres à meneaux et de grands salons, tandis que subsistent les caractéristiques de la place forte, notamment quatre tours massives, douves et ponts-levis. Originalité constructive, les douves ne baignent pas directement les murs : une terrasse de trois mètres de large permettait le positionnement des artilleurs tout autour du château. Le mobilier et les décors comptent de nombreux objets classés : le plafond à caissons de la salle des gardes, attribué à un auteur anonyme, comprend vingt-quatre tableaux répartis en six grands caissons de quatre hexagones ; seize de ces tableaux présentent une symbolique alchimique inspirée des trois principes que sont le mercure, le soufre et le sel, tandis que les huit autres illustrent des scènes proverbiales dont l’audace amena leur dissimulation au XVIIIe siècle. Sont également protégés une Vierge aux douleurs en bois polychrome, deux tapisseries des Flandres inspirées des Actes des Apôtres, une tapisserie du martyre de saint Étienne, des portraits de Jean Bourré (1461), de Marguerite de Feschal et de Charles Bourré peints au XVIIe siècle, deux natures mortes signées Quentin de La Tour et de nombreux meubles classés. L’idée d’un « logis alchimique » a été avancée en 1945 par l’hermétiste Eugène Canseliet, qui identifie des symboles alchimiques et ésotériques au château ; aucune source historique solide ne permet toutefois de confirmer cette interprétation, et la notion de symbolisme alchimique dans les monuments ne se répand qu’à partir du XVIIe siècle. Le château a servi de décor à de nombreux films et téléfilms, parmi lesquels Peau d’Âne (1970) de Jacques Demy avec Catherine Deneuve et Jean Marais, Louis XI, un seul roi pour la France (1980) de Jean-Claude Lubtchansky, Jeanne d’Arc, le pouvoir et l’innocence (1989) de Pierre Badel, Le Bossu (1997) de Philippe de Broca, Fanfan la Tulipe (2003) de Gérard Krawczyk avec Vincent Perez et Penélope Cruz, La Reine et le Cardinal (2008) de Marc Rivière avec Philippe Torreton, La Princesse de Montpensier (2010) de Bertrand Tavernier et Louis XI, le pouvoir fracassé (2010) d’Henri Helman.