Origine et histoire du Château du Saussay
Le château du Saussay, appelé aussi château du Grand-Saussay, se situe à Ballancourt-sur-Essonne, dans l'ancienne province du Hurepoix, aujourd'hui département de l'Essonne en Île-de-France, à trente-sept kilomètres au sud de Paris. Édifié sur le site d'une ancienne commanderie templière et sur les ruines d'un château féodal du XVe siècle, il forme un ensemble rare de deux pavillons jumeaux du XVIIIe siècle, face à face à l'entrée d'un parc romantique parcouru par des eaux; ses pièces de réception évoquent les personnages illustres qui y ont vécu. La plus ancienne mention notariée du « manoir du Sauçay » date d'une vente en 1328. Au XVe siècle, la châtellenie est donnée par Louis XI à Olivier Le Daim, qui acquiert le Saussay en 1474, est anobli la même année puis tombe en disgrâce et est exécuté en 1484; sa postérité et sa personnalité ont inspiré des figures littéraires. Après confiscation, le domaine passe à Jean de Selve à la fin du XVe siècle, puis est vendu en 1497 à Jean Lhuillier; Côme Lhuillier en est propriétaire en 1528, avant que le Saussay ne soit acquis en 1573 par René de Gaumont et transmis ensuite, par héritages familiaux et mariages, aux familles Bragelongne, Canclaux, Colbert-Chabanais et Bourbon Busset.
Durant les guerres de Religion, le château est incendié par une troupe de cinq cents Espagnols détachée de l'armée d'Alexandre Farnèse; il est rapidement rebâti par Laurent de Gaumont au début du XVIIe siècle. En 1622, Jean, son frère et héritier, fait entourer le domaine de douves, privilège accordé par lettre patente d'Henri IV, et André de Gaumont confie à Denis Pilet l'aménagement d'un jardin à la française. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, Jean-Baptiste de Gaumont entreprend d'importants réaménagements entre 1709 et 1725; il confie à l'architecte Jean Aubert l'harmonisation des ailes, qui aboutit à la création de deux pavillons aux proportions identiques, inspirés du Pavillon de la Lanterne. En 1746, Jean-Baptiste de Gaumont lègue le domaine à son petit-neveu Jean-Baptiste Claude de Bragelongne, qui termine l'aménagement des intérieurs. Jean-Baptiste Camille de Canclaux fait ensuite abattre la tour d'entrée en grès et fait élever deux pavillons autour d'un portail à son monogramme, et transforme les parterres en jardin paysagé; après une confiscation révolutionnaire, il rachète le château en 1793, démolit plusieurs bâtiments de la commanderie et agrandit le parc.
Par mariage, le domaine entre au XIXe siècle dans la famille des Colbert-Chabanais; le général marquis Pierre de Colbert double la largeur de l'aile sud-est et lui adjoint un pavillon, adapte les communs en orangerie, sellerie et vastes écuries, et réalise d'autres remaniements. En 1911, la propriété passe à la famille Bourbon Busset et le parc est redessiné par le paysagiste Achille Duchêne; l'académicien Jacques de Bourbon Busset y vit, et ses descendants y résident aujourd'hui. Le château est partiellement inscrit au titre des monuments historiques le 19 janvier 1951.
L'architecture primitive antérieure à l'incendie de 1593 demeure inconnue; la plus ancienne représentation connue montre l'état de l'édifice après la restauration du début du XVIIe siècle, peut-être sous la forme d'un pentagone à quatre tours d'angle et d'une tour d'entrée centrale. Au fil du XVIIIe siècle, l'aspect fortifié est progressivement adouci: le châtelet et le pont-levis subsistent du côté du parc mais l'ensemble prend une allure plus harmonieuse, avec façades en grès et briques, toits en ardoise et ouvertures de toit dessinées par Aubert. Après la Révolution, Canclaux remplace le pont-levis par un pont en pierre, abattant la tour d'entrée; il fait aussi élever, avant la Révolution, deux pavillons d'entrée de forme carrée attribués à Claude‑Nicolas Ledoux, même si l'on ignore s'il en suivit directement la réalisation.
Les matériaux employés proviennent de la région: calcaire et meulière pour la maçonnerie, sables et argiles pour mortiers, briques et tuiles, et bois pour charpentes et lambris; une tuilerie et un four à chaux existaient à proximité et une carrière sur le Mont a fourni des pierres. Des restaurations importantes ont été engagées à la fin du XIXe siècle par Pierre de Colbert-Chabanais, qui remplace des briques, applique des stucs imitant la pierre et modifie l'aspect des façades; la ferme extérieure a été partiellement détruite par un incendie dans les années 1950 puis rebâtie, et l'ensemble des toitures en ardoise a été restauré à la fin du XXe siècle. Les boiseries et lambris avaient été peints en camaïeux de gris au XIXe siècle; cet état subsiste aujourd'hui uniquement dans un petit salon et le grand escalier.
Le château sert régulièrement de lieu de tournage pour des films et téléfilms historiques, parmi lesquels Joseph Balsamo (1973), Les Liaisons dangereuses (1988), la adaptation télévisée d'Une vie par Élisabeth Rappeneau (2004) et la série Le Bazar de la Charité (2019).