Origine et histoire
Le château Ganne, situé entre Thury-Harcourt et Pont-d'Ouilly sur un promontoire contrôlant le chemin de Bretagne franchissant l'Orne et implanté sur les terres de La Pommeraye dans la Suisse normande, conserve des vestiges d'un château fort des XIe-XIIe siècles. Le site boisé comprend une tour-porche et trois enceintes de terre bordées de remparts et de fossés ; les deux premiers enclos correspondent à des basses-cours et la dernière enceinte, qui supporte le donjon et la tour-porche, constitue la partie résidentielle. Étudié depuis le début du XIXe siècle et décrit notamment par Arcisse de Caumont, ce domaine a été fortement affecté par la tempête du 26 décembre 1999. Le nom de « château Ganne » lui a été donné au XVIIIe siècle ; il était auparavant connu comme château de la Pommeraye. Propriété des seigneurs de La Pommeraye jusqu'au milieu du XIIe siècle, il vit sa chapelle castrale confiée en 1167 aux chanoines de l'abbaye du Val par Henri II de la Pommeraye, puis être confisqué en 1180 par le roi d'Angleterre et duc de Normandie Henri II Plantagenêt pour des raisons non précisées. La famille de La Pommeraye retrouve le lieu au début du XIIIe siècle, mais à la mort de Goscelin III en 1219 le château passe à un neveu de la famille de Fontaine plutôt qu'à son fils Henri ; la famille de Fontaine demeure détentrice au début du XIVe siècle, avant que la propriété ne change plusieurs fois de mains. Aménagé en parc romantique à la fin du XIXe siècle, le site donna naissance à la légende l'associant à Ganelon. Acquis par le conseil général du Calvados en 2003, le château fait l'objet de fouilles archéologiques et d'un projet d'étude pluridisciplinaire, des campagnes dirigées entre 2004 et 2011 par Anne-Marie Flambard Héricher.
Le dispositif défensif primitif repose sur la pente naturelle, des fossés et des remparts de terre élevés avec les terres extraites et couronnés de palissades ; l'ensemble s'étend sur environ 350 mètres de long et 80 à 100 mètres de large. La première basse-cour, d'environ 8 000 m2, est ceinturée d'un talus et d'un fossé ; plusieurs chemins s'y rejoignent avant la porte donnant accès à la deuxième basse-cour, longue de 100 mètres et large de 25 à 40 mètres. Un rempart de terre et un fossé séparent les deux basses-cours, et une courtine maçonnée a été édifiée lors de la dernière phase d'occupation. Les fouilles ont mis au jour un puits, un bâtiment résidentiel, un bâtiment domestique et une chapelle. Le bâtiment résidentiel, construit au XIIe siècle en grès schisteux avec des piédroits de porte en calcaire, présente des colonnettes encadrant les ouvertures et des fenêtres vitrées à l'étage, indices d'une salle d'apparat destinée à recevoir des hôtes ; l'étage était desservi par un escalier et séparé du rez-de-chaussée par un plancher de bois. Le bâtiment domestique en grès schisteux, daté de la fin du Xe siècle, comprend un four à pain et des installations pour diverses activités quotidiennes ; il a succédé à une cabane en bois et à des appentis ouverts abritant un foyer au début du Xe siècle. Le puits, initialement découvert, fut ultérieurement couvert et relié au bâtiment par un couloir de pierre. La chapelle, citée pour la première fois en 1167, utilise également le calcaire pour souligner des lignes architecturales ; ses fenêtres comportaient des vitraux, ses murs étaient ornés de peintures murales géométriques et possiblement figuratives très colorées, et des pierres sculptées réemployées provenant d'un édifice du XIe siècle y figuraient ; des fonts baptismaux et des banquettes ont été ajoutés à la fin du XIIIe siècle.
La séparation entre la deuxième basse-cour et la haute-cour se fait par un fossé profond de 4,5 mètres et large de 12,5 mètres, franchi autrefois par un pont dont une partie mobile protégeait l'accès devant la tour-porche. Cette tour présente des piédroits en calcaire et des maçonneries en grès schisteux disposées en arête-de-poisson ; un large passage voûté à sa base permettait le passage des charrettes. La haute-cour, de plan ovale, mesure environ 65 mètres sur 45 mètres et était entourée d'un mur de pierre ; elle n'avait pas été fouillée à la date de 2008. Les vestiges visibles et enfouis du château sont inscrits au titre des monuments historiques par arrêté du 25 septembre 2000, et le site, acquis en 2003 par le conseil départemental du Calvados, bénéficie d'un classement de ses abords en espaces naturels sensibles. Des premiers résultats de fouilles archéologiques ont été publiés sous la direction d'Anne-Marie Flambard Héricher.