Origine et histoire du Couvent de la Visitation
Le couvent de la Visitation, ou couvent Sainte-Marie, est un ancien couvent de Visitandines situé à Thonon-les-Bains, en Haute‑Savoie. Quitté par les religieuses à la fin des années 1960, il accueille aujourd’hui la médiathèque municipale, une école de musique, un espace d’exposition et l’Académie chablaisienne. L’ensemble est partiellement inscrit au titre des monuments historiques depuis 1973.
Le site se trouve depuis le centre ancien dans l’axe de la rue Chante‑Coq, bordé par la place du marché au sud et par la rue des Granges à l’ouest ; à l’origine il était implanté extra‑muros, en vis‑à‑vis d’une porte de la ville. Le couvent couvre environ 2 900 m2 et s’organise autour de deux cours intérieures : à l’ouest la cour des provisions et à l’est le cloître. Les bâtiments comportent rez‑de‑chaussée et deux étages, certains avec un niveau de cave, desservis par quatre escaliers ; leur orientation générale est est‑nord‑est / ouest‑sud‑ouest, à l’exception du bâtiment occidental aligné sur la rue des Granges. Une petite place au sud‑ouest a été remplacée par l’auditorium de la médiathèque à la fin des années 2010.
L’église, située au nord‑ouest en bordure de la cour des provisions, est un édifice à nef unique de 22,6 m de long sur 8 m de large, comprenant une nef en trois travées, un chœur de plan carré voûté en arêtes, deux petites chapelles formant les bras du transept et une crypte. À l’ouest, le bâtiment des sœurs tourières, situé entre la rue des Granges et la cour des provisions, faisait office d’interface avec l’extérieur et de limite de la clôture ; il abritait deux « tours », dispositifs cylindriques en bois permettant de faire passer des objets à travers une cloison sans contact direct, ainsi que des parloirs. L’aile ouest du cloître, accolée au sud du chœur, contenait au rez‑de‑chaussée le chœur des religieuses, communicant avec l’église par une grande baie grillagée, et accueillait à l’étage l’infirmerie de la communauté jusqu’au XIXe siècle ; au début du XXIe siècle, l’Académie chablaisienne occupait ses combles. L’aile sud, qui abritait au XVIIe siècle les cellules des religieuses, présentait des inscriptions murales peintes sous forme de sentences tirées de la Bible ou de Thomas d’Aquin ; huit de ces peintures étaient conservées in situ avant les travaux du XXIe siècle.
Parmi les bâtiments annexes, l’ancien moulin à eau, de l’autre côté de la place du marché, a été reconverti en restaurant et sa meule est visible devant le bâtiment. Le bief qui alimentait le moulin, le canal de l’Oncion, alimentait également le château de Ripaille et remonte au XIVe siècle ; bien que détruit en 1959, il est aujourd’hui matérialisé par un canal plus modeste dans le parc jouxtant le moulin et la place du marché.
Fondé d’abord à Évian en 1625, le couvent connaît des difficultés liées à l’absence de confesseurs et à l’impossibilité de s’étendre, ce qui provoque son transfert à Thonon en 1627 ; Jeanne de Chantal juge ce nouveau siège « plus illustre et mieux fourni des choses nécessaire à l’entretien de la vie religieuse » et réside sur place en 1639, validant vraisemblablement le plan du nouvel établissement. La communauté s’installe d’abord dans une maison acquise par Marie de Charmoisy, puis, en 1633, sur le site actuel composé de granges, maisons, jardins, verges et vignes, achat rendu possible par les dons du marquis Albert de Lullin ; d’autres propriétés sont acquises en 1636.
La première phase de construction, entamée en 1637 lorsque les visitandines prennent possession des lieux, se prolonge jusqu’en 1685 avec les travaux de la sacristie et comprend plusieurs campagnes : travaux dans des bâtiments préexistants, construction de l’aile ouest du cloître en 1649, de l’aile sud en 1657 puis de la jonction avec le bâtiment sud‑ouest en 1674 ; l’église, peut‑être commencée en 1666, est achevée en 1684 et l’amorce de l’aile nord construite en 1685, laissant alors le cloître partiellement ouvert sans aile est ni la moitié de l’aile nord.
En 1793, dans le contexte révolutionnaire, les religieuses quittent le couvent ; passé entre des mains laïques et majoritairement loué, il sert de logements et d’installations agricoles ou commerciales. Racheté en 1835 par le couvent de la Visitation de Lyon, il retrouve une communauté de visitandines et les travaux du cloître reprennent en 1840 pour se poursuivre jusqu’en 1848, date à laquelle sont construits l’aile orientale et la partie manquante de l’aile nord ; les ailes préexistantes sont alors surélevées d’un étage, la charpente du XVIIe siècle transformée et les combles agrandis.
Le 22 novembre 1968 les religieuses quittent définitivement le site pour Marclaz ; le bâtiment est ensuite partiellement affecté à la bibliothèque municipale puis, en 2018, devient le Pôle culturel de la Visitation, accueillant plusieurs institutions et associations. L’édifice a été partiellement classé au titre des monuments historiques en 1973 pour ses façades et toitures et, depuis 1988, l’inscription protège également les dix inscriptions murales du XVIIe siècle qu’il contient.