Période
1ère moitié XIXe siècle
Patrimoine classé
Façades et toitures du château (cad. A 193) : inscription par arrêté du 27 avril 1976 ; Façades et toitures de l'ensemble des bâtiments, à l'exclusion des bâtiments contemporains ; obélisque et moulin à vent ; murs d'enceinte avec leurs piliers et grilles ; potager avec ses serres et ses murs ; parc avec l'ensemble de ses aménagements paysagers et hydrauliques (cad. A 160 à 192, 194 à 222, 233, 234, 247 à 250, 253 à 273, 275 à 295, 297 à 312, 314, 316, 317, 345 à 350, 617, 618, 622 à 628, 730, 780) : inscription par arrêté du 28 décembre 1992
Origine et histoire du Château de Beaurepaire
Le domaine de Beaurepaire, également appelé château de Martinvast, est une demeure implantée sur la commune de Martinvast dans le nord du département de la Manche. Installé dans un parc paysager à l'anglaise, le château actuel inclut des éléments datés du XVe, du XVIe et du XIXe siècle. Sur ce site se trouvait l'ancien château féodal de la famille de Martinvast, ruiné en 1398 durant la guerre de Cent Ans, des aveux de 1398 et 1607 mentionnant un manoir sur motte dont il ne subsiste aujourd'hui aucune trace. Aux XVe–XVIe siècles, la famille de Beaurepaire du Moncel prend possession de la terre de Martinvast et Berthole du Moncel reconstruit le logis Renaissance entre 1579 et 1581 tout en conservant le donjon circulaire du XIVe siècle entouré de douves et de marécages. Jacques du Moncel est qualifié de seigneur de Beaurepaire dans un aveu de 1616. Jean‑François du Moncel (1729‑1809) y décède en 1809. L'impératrice Marie‑Louise est reçue au château les 29 mai 1811 et 27 août 1813 par le comte Alexandre du Moncel, qui devint pair de France en 1846 et acheva sa carrière au grade de général de brigade. À partir de 1820 et jusqu'à sa mort en 1861, le comte Alexandre du Moncel entreprend d'importants travaux : il remblaie les douves, draine le terrain, supprime les étangs, élève quatre tours qui effacent les vestiges du vieux château tout en conservant le donjon médiéval, aménage et agrandit le parc, et crée un jardin à l'anglaise. Il développe aussi une exploitation agricole moderne employant une centaine de personnes et comprenant moulins, huileries, pressoir et boulangerie, et en 1850 le gouvernement y installe une ferme‑école dont il prend la direction. En 1861, son fils Théodose du Moncel hérite du domaine, puis la comtesse du Moncel le vend en 1867 à l'épouse du baron Arthur de Schickler. Le baron fait agrandir et remanier le château dans un « style gothique aux accents victoriens » par l'architecte britannique William Henry White : les plans sont exposés aux Salons des Beaux‑Arts en 1867 et 1869, une galerie nord et une aile sont ajoutées pour relier le donjon au logis du XVIe siècle, des serres sont établies et un haras est construit par Charles Letrosne. Le baron enrichit le parc d'essences exotiques et confie la décoration des massifs floraux à Lévy‑Dhurmer, complétant ainsi le grand parc paysager aménagé par le comte du Moncel. Pendant la Seconde Guerre mondiale, le château est occupé par des officiers supérieurs allemands et subit des dommages : l'aile gauche du logis du XVIe siècle est détruite par un incendie consécutif à un bombardement britannique du 16 janvier 1944 impliquant des bombes au phosphore, puis en mai 1944 un bombardement américain atteint la ferme et les granges et détruit la moitié de l'aile néogothique du XIXe siècle. Après la guerre, Marguerite de Schickler, épouse du comte Hubert de Pourtalès et héritière du domaine, fait reconstruire le pavillon Renaissance mais ne rétablit pas la galerie nord ni la salle à manger ; le manteau de cheminée sculpté dessiné par White, intitulé L'Arche de Noé, est conservé. En 1967 le petit‑fils, le comte Christian de Pourtalès‑Schickler, restaure l'aile gauche détruite, puis à partir de 1995 il fait édifier une galerie de liaison reliant cette aile aux parties intactes du château du XIXe siècle. La tour circulaire du XVe siècle et le petit bâtiment qui lui est accolé constituent les éléments les plus anciens du domaine. L'ensemble reconstruit dans la seconde moitié du XIXe siècle adopte un parti médiéval et relève du style Second Empire, que certains auteurs rapprochent de l'école de Viollet‑le‑Duc. Jusqu'en 1944, les bases des colonnes situées au sud, de part et d'autre de l'escalier central extérieur, portaient les armes du baron de Schickler et de son épouse Jeanne Roger du Nord ; ces éléments ont été sauvés et servent aujourd'hui de supports à deux vasques côté nord. L'intérieur a été réaménagé dans un style gothico‑victorien imposant par William Henry White pour le baron de Schickler. Dans la galerie, un tableau brodé expose les armes de la famille de Pourtalès. Le parc anglais, d'une superficie d'environ cent hectares et aménagé vers 1820 par le comte Alexandre du Moncel sous la Restauration, comprend bois, prairies, étangs, une cascade, de somptueux massifs floraux et des fabriques, ainsi que des sculptures, dont deux lions supportant des colonnes torses en marbre de Vérone et une statue en marbre de Gaetano Motelli. Parmi les fabriques se trouve un obélisque qualifié de « haute folie », probablement érigé par Alexandre du Moncel à la limite avec Hardinvast ; il s'agit d'une tour de plusieurs mètres, coiffée d'une toiture pointue, percée d'oculi et accessible par un escalier intérieur. Le parc a été complété par le baron de Schickler d'essences exotiques et d'importants massifs d'arbustes à fleurs tels que rhododendrons, camélias et hortensias, protégés par des conifères exotiques. Le domaine a reçu la visite de personnalités impériales et royales, parmi lesquelles Marie‑Louise, Joséphine, Eugénie, la reine Victoria et l'empereur Pedro Ier du Brésil. Les façades et les toitures du château sont inscrites au titre des monuments historiques par arrêté du 27 avril 1976. Par arrêté du 28 décembre 1992 sont inscrits les façades et toitures de l'ensemble des bâtiments à l'exclusion des constructions contemporaines, l'obélisque, le moulin à vent, les murs d'enceinte avec leurs piliers et grilles, le potager avec ses serres et murs, ainsi que le parc avec l'ensemble de ses aménagements paysagers et hydrauliques. En juillet 1922, quelques scènes du film muet La dame de Monsoreau de René Le Somptier sont tournées au château, le reste du tournage ayant lieu au château de Nacqueville.