Origine et histoire de l'Église Sainte-Croix
Située dans la citadelle de Bastia, l'église Sainte-Croix jouxte une autre église avec laquelle elle partage le clocher. Elle se compose d'une nef à six travées, close à l'est par un chevet carré, et des chapelles latérales s'ouvrent dans la quatrième travée. Les travées de la nef et les chapelles sont séparées par des pilastres qui reçoivent la retombée des voûtes en anse de panier par l'intermédiaire de corniches. Murs, voûtes, pilastres et corniches sont couverts d'une riche décoration peinte et dorée en style rocaille, typique de l'esthétique Louis XV, toute en or sur fond blanc. Dans la chapelle sud, les caissons de la voûte renferment de petits tableaux peints. Les murs sont en maçonnerie de moellons enduits et les toitures sont couvertes de lauzes frustes de Brando.
La confrérie de Sainte-Croix, la plus ancienne de Bastia, gérait l'hôpital génois attenant, destiné aux pauvres, aux infirmes et aux enfants trouvés ; ce grand bâtiment, longtemps désaffecté, a été transformé en résidence. L'origine de la confrérie remonte au début du XVe siècle et, avec une autorisation papale, elle fit bâtir une chapelle en 1542 sur un terrain appartenant à la basilique Saint-Jean-de-Latran à Rome. L'édifice actuel a été construit en 1600 à la place de la chapelle plus petite qui fut détruite. L'oratoire Sainte-Croix est classé au titre des monuments historiques en 1931.
Le décor primitif disparut à la suite des bombardements de la flotte anglaise le 17 novembre 1745. L'oratoire est célèbre pour son décor de stucs dorés de style "barocchetto" génois, considéré comme unique en Corse ; ce décor, réalisé en deux campagnes (1758-1759 et 1772-1775) par divers stucateurs corses et ligures, a été exécuté notamment par Tomaso Mencacci, Matteo Vacca et Antonio Firpo. Le barocchetto correspond à l'esthétique du style Louis XV, appelé aussi rocaille ou rococo, et l'ornementation foisonne : feuillages, guirlandes de fleurs et coquillages couvrent murs et voûte.
Le maître-autel, refait au XVIIIe siècle dans le style baroque, comporte de grands cartouches portant des inscriptions qui rappellent le lien de la confrérie avec l'église du Latran, surmontés de tiares pontificales et des clefs de Saint-Pierre. Le tableau qui surmonte l'autel représente l'Annonciation ; il est l'œuvre du peintre florentin Giovanni Bilivert, datée de 1633. Au centre de la voûte, un médaillon peint représentant l'Annonciation, daté de 1758, est encadré de stuc doré et paraît soutenu par quatre angelots ; cette peinture est l'œuvre du Bastiais Saverio Farinole, membre et prieur de la confrérie.
La chapelle du Crucifix des Miracles, dite du Christ Noir, est décorée d'un plafond à caissons de style Renaissance ; la statue du Christ noir, placée dans une niche au-dessus de l'autel, aurait été trouvée en mer par deux pêcheurs, Camugli et Giuliani, selon la légende, et fait l'objet d'une fête chaque année le 3 mai. Le parvis, autrefois occupé par un gros rocher, fut rasé en 1818 et orné d'une mosaïque de galets venus de la plage de Miomu, selon une tradition génoise. La façade principale, côté sud, est sobre ; trois inscriptions figurent au-dessus de la porte, dont un cartouche couronné de la tiare et des clefs de Saint-Pierre rappelant l'attachement de la confrérie au Latran. L'église demeure l'un des monuments les plus visités de Bastia, connue pour la richesse de ses décors et pour le Crucifix des Miracles.
