Origine et histoire du Château de Doué-la-Fontaine
La motte féodale et les vestiges du donjon de Doué-la-Fontaine, sur la commune déléguée de Doué-la-Fontaine (Doué-en-Anjou, Maine-et-Loire), témoignent de la transformation d'une aula carolingienne en fortification en pierre. Le site est classé au titre des monuments historiques par arrêté du 19 décembre 1973. Les restes se situent au sud de la commune, à l'angle du boulevard du docteur Lionet et de l'impasse de la Motte, à moins de 100 mètres de la route départementale 69. Le développement du site remonte à l'époque mérovingienne, marquée par l'extraction souterraine de sarcophages. À la fin du VIIIe et au IXe siècle, les rois carolingiens puis les rois d'Aquitaine disposaient à Doué d'une résidence, mentionnée dans les textes comme villa ou palatium, et le prince Louis, roi d'Aquitaine, en fit l'une de ses quatre résidences préférées. Vers 900 fut édifiée sur le site une aula carolingienne de 23 × 17 mètres aux murs épais de 1,7 à 1,8 mètre. Un incendie, vers 930-950, détruisit la charpente ; les ouvertures furent alors murées, les murs badigeonnés de chaux et l'édifice surélevé pour créer un étage, tandis que le rez-de-chaussée devint un cellier aveugle accessible depuis l'étage, à cinq mètres au-dessus du sol, par un perron en charpente. Cette transformation fit de l'aula une tour maîtresse fortifiée, faisant de Doué-la-Fontaine l'un des plus anciens châteaux en pierre connus. Au début du XIe siècle, la partie basse du bâtiment fut « emmottée » : des terres rapportées masquèrent les parois extérieures du rez-de-chaussée pour prévenir la sape, transformant l'aula enterrée en motte castrale surmontée d'une fortification en bois et entourée d'un fossé profond de cinq mètres et large d'environ quinze mètres. De la tour détruite au XIe siècle subsiste aujourd'hui essentiellement la portion emmottée, c’est‑à‑dire l'aula carolingienne initiale, et sur le sommet de ses murs les premières arases de la surélévation des années 950. Des fouilles menées de 1967 pendant trois années par Michel de Boüard, opération considérée comme fondatrice de l'archéologie médiévale, ont mis au jour notamment les murs d'une cuisine recouverts d'un enduit portant des graffitis représentant des personnages, des animaux et des scènes religieuses telles que la Vierge à l'Enfant et la Crucifixion; la pièce qui servait de cuisine avant l'incendie a manifestement changé de destination. Le premier bâtiment castral était donc une grande salle d'un seul niveau, résidence d'un comte d'Anjou, construite et dallée en pierre à la fin de l'époque carolingienne. Les murs, composés de pierres de tailles très disparates, présentent une épaisseur comprise entre 1,72 et 1,8 mètre. Un mur intérieur divisait l'aula en deux espaces : la partie nord, d'environ 178 m², avec dallage en pierre et foyer, et la partie sud, d'environ 72 m², pourvue d'une cheminée et interprétée comme une cuisine d'après les restes mis au jour. Deux portes existaient, dont une principale à l'ouest haute de trois mètres et une plus petite sur la façade sud, et des trous de boulin encadraient les accès. Sous l'aula, la fouille du puits a révélé une petite carrière souterraine, située à 7–12 mètres de profondeur et couvrant 120 à 150 m², antérieure à l'aula et creusée d'abord pour extraire des sarcophages, dont des fragments subsistent encore; cette carrière servit ensuite de carrière de pierre pour la construction puis la surélévation de l'aula. Lors de la transformation en château, un couloir descendant et un escalier furent creusés pour relier le cellier du rez-de-chaussée à la carrière, qui devint ainsi une cave annexe. Par sa conversion d'aula carolingienne en donjon médiéval, Doué se range parmi les premiers châteaux de pierre, avec Langeais. La motte dite de la Chapelle avait à l'origine une forme tronconique, haute d'environ sept mètres, avec un diamètre à la base d'environ cent mètres et de quarante-deux mètres au sommet.