Origine et histoire
Le château de Bouillancourt-en-Séry, situé au centre du village de Bouillancourt-en-Séry dans la Somme, prend ses origines au début du XIIIe siècle. À l’origine, il présentait un plan hexagonal sans donjon, avec une tour cylindrique à chaque angle et destinait à défendre la vallée de la Bresle. La présence du château est attestée en 1218, lorsque Guillaume de Cayeu y fonda une chapelle dédiée à saint Eustache dans la tour nord‑est, confiée à l’abbaye Notre‑Dame de Séry. Des fouilles menées par l’INRAP en 2023 ont confirmé la structure hexagonale et la disposition de six tours reliées par des murs épais contenant des galeries de communication. Ces tours, hautes d’environ vingt mètres, avaient des bases en pierre calcaire parfois associées à des assises de silex et de briques ; certaines meurtrières subsistent encore. Le sommet des tours était autrefois pourvu de créneaux, supprimés lors des réaménagements des XVIIe et XVIIIe siècles. Une première porte donnait accès à une basse‑cour fortifiée, entourée d’une enceinte renforcée par des tours isolées séparées du plateau par de larges fossés ; certaines de ces tours ont été repérées lors de fouilles anciennes et confirmées en 2023. Le site a conservé une fonction défensive du XIIIe au XVe siècle et a subi des dommages pendant la guerre de Cent Ans, notamment lors de la prise par des troupes anglaises en 1433. Progressivement rendu obsolète par l’évolution des techniques militaires, le château a été partiellement détruit au XVIIe siècle ; il ne subsiste aujourd’hui que les deux tours de la façade ouest, héritage que la DRAC a signalé lors de l’inscription en 2001 comme témoignage d’une architecture castrale médiévale.
La seigneurie a changé de mains à plusieurs reprises entre le XVe et le XVIIe siècle : la famille de Cayeu s’en est séparée en 1435, puis se succédèrent des familles telles que d’Étampes, de Mailly, Gonzague‑Nevers et de Rambures, avant la vente à Jean L’Yver en 1634. Dans la décennie 1640, deux tours furent détruites et Jean L’Yver fit édifier un logis seigneurial dont il ne subsiste aujourd’hui aucune trace. Au milieu du XVIIIe siècle, des travaux importants transforment la forteresse en demeure : deux nouvelles tours sont abattues et le corps de logis actuel, élevé sur trois niveaux et conforme aux goûts des XVIIe‑XVIIIe siècles, est construit entre les tours restantes ; les fossés sont comblés et les créneaux supprimés. La façade ouest associe briques et pierre de Caen, et les vestiges médiévaux sont conservés comme éléments décoratifs, marque d’un renouvelé intérêt pour l’esthétique médiévale. Vers 1886, les armoiries des familles Ternisien de Boiville et Le Boucher d’Ailly de Richemont furent apposées entre les deux tours, encadrées de fausses meurtrières et de faux mâchicoulis.
Au XIXe siècle, le château connaît d’autres aménagements : une aile sud destinée au service est ajoutée, puis, entre 1887 et 1900, Paul de Boiville réaménage des niveaux, crée un bureau de style victorien et fait édifier la maison du concierge ; il réorganise également l’ancienne basse‑cour en y construisant les écuries et dépendances agricoles encore visibles aujourd’hui, tandis qu’un pigeonnier en torchis s’est effondré au début des années 2000. Le parc a conservé de nombreux arbres séculaires — hêtres pourpres, tilleuls, platanes et érables sycomores — et une grande allée de 144 tilleuls plantés au XIXe siècle ; il continue d’allier fonctions décoratives et usages agricoles, avec un potager mené en permaculture et en maraîchage sur sol vivant.
Racheté en 2020, le château a été ouvert au public et accueille depuis des projets associatifs et culturels variés. Labellisé Fabriques de Territoires en 2023, il héberge des résidences d’artistes, des concerts, des visites historiques, des expositions, une épicerie participative et des activités culinaires, et soutient un potager en permaculture. Lauréat pour la Somme du « loto du patrimoine » porté par la Mission Bern, il a bénéficié d’une aide permettant des restaurations en 2023, soutenues également par la DRAC Hauts‑de‑France et plusieurs fondations et partenaires. Le château a par ailleurs accueilli la flamme olympique lors des Jeux de Paris.