Origine et histoire du Château de Saint-Léon-Pfalz
Le château dit Saint-Léon-Pfalz, au cœur du village d'Eguisheim, s'appuie sur les vestiges d'une forteresse médiévale caractérisée par un tracé octogonal. Longtemps daté du XIe ou XIIe siècle à partir de textes concernant le Haut-Eguisheim, son plan octogonal, son donjon central de même forme, ses bossages et ses marques de tâcheron conduisent aujourd'hui les spécialistes à le situer au début du XIIIe siècle, en le rapprochant d'exemples similaires comme le Burgstall de Guebwiller et Wangen. Les fouilles de 1994–1995 n'ont révélé aucun vestige antérieur et la première mention certaine de l'édifice figure dans un inventaire de l'évêque Jean de Dürbheim en 1355. Conçu par les comtes d'Eguisheim, il passa au XIIIe siècle dans le patrimoine de l'évêché de Strasbourg et abrita jusqu'à la Révolution le bailli épiscopal. Au fil du temps, le château connut des occupations militaires et des pillages, des restaurations à la fin du XVIe siècle qui expliquent les fenêtres à meneaux du logis, puis une dégradation progressive. Confisqué comme bien national à la Révolution et vendu en 1795, il subit la destruction du donjon et de l'avant-corps du portail pour y installer des logements d'ouvriers ; ces constructions post-révolutionnaires furent détruites par un incendie en 1877 et le site demeura en ruine plusieurs années. En 1885, l'évêché de Strasbourg, à l'initiative de Mgr Pierre-Paul Stumpf, acheta le château pour y ériger une chapelle dédiée à saint Léon IX ; le projet confié à l'architecte des Monuments historiques Charles Winkler entraîna la démolition des derniers vestiges du donjon central et la construction d'une chapelle néo-romane, suivies d'aménagements néo-renaissance du logis. L'attribution du lieu comme lieu de naissance du pape Léon IX, largement diffusée au XIXe siècle, est aujourd'hui controversée. Le château appartient désormais à la commune d'Eguisheim : la chapelle, consacrée en 1894, est généralement accessible au public et reste occasionnellement utilisée pour des offices, tandis que les bâtiments accueillent réceptions et expositions.
Sur le plan architectural, l'enceinte visible suit un octogone quasiment régulier dont les côtés mesurent environ 13 m et le petit diamètre avoisine 31,4 m ; l'épaisseur du mur est proche de 1,80 m. Les assises inférieures sont composées de moellons de grès jaune à bossages sur une hauteur d'environ 5 m ; plus haut, l'appareil passe à des moellons de grès rose, les bossages continuant d'accentuer les angles. Le pan ouest comporte une meurtrière à arc en plein cintre, le pan sud a reçu des fenêtres au XIXe siècle et la porte d'entrée se situait au sud-est, dont subsiste une amorce. Le donjon central, aujourd'hui disparu, était lui aussi octogonal, avec des côtés d'environ 4 m et des murs d'environ 2,20 m d'épaisseur, construit en pierres à bossages. Le logis, adossé à l'intérieur du côté sud de l'enceinte, a une profondeur d'environ 8 m ; ses fenêtres à meneaux sont d'origine XVIe siècle et son aspect actuel, avec tourelle d'escalier néo-renaissance, résulte des restaurations menées à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. D'autres dépendances adossées à l'enceinte ont existé mais leur nombre et leur disposition restent imprécis en raison des transformations et de l'incendie ; les plans de 1790 constituent une des principales sources pour leur restitution.
La chapelle Saint-Léon, réalisée en grès rose sur le projet de Charles Winkler, s'étire du centre de l'octogone vers le pan nord-ouest : son chevet forme une abside en saillie sur la base du mur, le corps est rectangulaire avec un toit à deux pans couvert de tuiles vernissées, et les murs latéraux sont soutenus par des contreforts encadrant des oculi au-dessus de fenêtres géminées. Le pignon nord-est présente une arcature à baies aveugles surmontée d'un clocheton, et l'entrée, précédée d'un narthex, est surmontée d'une niche abritant une statue de saint Léon IX. À l'intérieur, la nef de 14 m sur 8,60 m, divisée en trois travées, est couverte d'une voûte en berceau échancrée par six lunettes ; le chœur semi-circulaire est orné d'une statue de saint Léon et d'un reliquaire contenant un fragment d'os crânien. Le décor, aux couleurs vives, comprend des fresques attribuées à un artiste nommé Martin, des vitraux représentant des saints d'Alsace, une fresque du chœur représentant le Christ en gloire avec Pierre et Paul, et sept médaillons sur la voûte illustrant les étapes de la vie de saint Léon IX.
