Origine et histoire de l'Hôtel de ville
L'hôtel de ville de Reims abrite les institutions municipales depuis 1499. Lors de travaux, on a mis au jour à trois mètres de profondeur des vestiges d'une domus romaine, pilastres et une voie menant vers la Banque de France. Le Conseil de ville acheta en 1499 un immeuble sur la place du Marché-aux-Chevaux, mais il s'avéra rapidement trop exigu ; le remboursement d'une dette de 22 000 livres par le duc de Guise permit de lancer le projet d'un nouvel édifice. La première pierre fut posée le 18 juin 1627 par Nicolas Lespagnol et la construction fut conduite par l'architecte municipal Jean Bonhomme. La première aile, donnant sur la rue des Consuls (actuelle rue du Général-Sarrail), fut livrée rapidement et le Conseil y siégea dès 1628. L'édifice est élevé en pierre de Lagery et son campanile comportait une cloche fondue par Pierre Roussel ; une première statue du roi, peut-être en bois, fut détruite pendant la Révolution. La façade fut inaugurée en 1636 par Claude Lespagnol ; elle fut complétée par une nouvelle statue commandée à Aimé Milhomme en 1818 et par la construction d'une tour d'angle en 1823. Entre 1820 et 1823, les bâtiments situés sur l'actuelle cour furent acquis et consolidés sous la direction des architectes Troyon et Serrurier, qui épaissirent les murs. En 1863, la construction reprit pour les deux dernières ailes sous la conduite de Narcisse Brunette et de son frère Nicolas, et l'ensemble fut inauguré en 1880. L'hôtel de ville fut incendié le 3 mars 1917 pendant la Première Guerre mondiale ; la reconstruction débuta en 1924 sous la direction de Bernard Humbold, avec les architectes Roger-Henri Expert et Paul Bouchette, et les sculptures furent confiées au sculpteur rémois Paul Berton. L'édifice reconstruit fut inauguré le 10 juin 1928 par le président de la République Gaston Doumergue, à l'occasion de la visite de l'Exposition Internationale des meilleures marques à Reims. Avant l'incendie, le bâtiment accueillait successivement un musée depuis l'an III, des archives, la Caisse d'épargne, une bibliothèque installée en 1764 avec des ouvrages confisqués au Collège des Jésuites, ainsi que des services judiciaires, la police ou la Chambre de commerce selon les époques ; il est actuellement consacré aux services municipaux, complétés par des annexes et des services décentralisés (voirie, espaces verts, police municipale).
Le bâtiment a une silhouette presque carrée, avec quatre ailes semblables qui ouvrent sur une cour où se dresse une statue de René de Saint-Marceaux symbolisant la vigne et la mousse de Champagne. Chaque angle est marqué par une tour carrée et le toit, en ardoise, présente des pans coupés. La façade sud est surmontée d'un campanile octogonal muni d'une horloge qui sonne le quart d'heure ; la face principale compte vingt hautes fenêtres réparties sur deux niveaux, encadrées de colonnes. L'entrée est flanquée de quatre niches qui n'ont jamais accueilli les statues prévues ; elle est surmontée d'une statue équestre de Louis XIII foulant deux prisonniers, œuvre de Nicolas Jacques, initialement en bronze et remplacée en pierre après sa destruction pendant la Révolution, avec sous elle une plaque portant une inscription latine. Les tours prolongent l'esthétique des façades tout en étant légèrement avancées et munies d'un étage supplémentaire.
L'hôtel de ville bénéficie d'une protection aux titres des monuments historiques : il figure sur la liste de 1862, les façades et couvertures de la façade principale, des pavillons d'angle et leur retour ainsi que le campanile central ont été classés par arrêté du 9 mars 1922, et le sol de la place a été classé par arrêté du 4 juin 1952. Les bas-reliefs entre les fenêtres furent exécutés entre 1853 et 1856. Le grand salon, situé au sommet de l'escalier d'honneur, présente un balcon sur la place, une décoration soignée, un orgue en partie et une série de peintures murales encadrées de nombreuses sculptures ; la porte du salon d'honneur a été dessinée par Carlo Sarrabezolles et réalisée par le ferronnier d'art Marcel Decrion. Les archives conservent des contrats montrant l'intervention de la famille Bonhomme : Jean Bonhomme a travaillé à la construction de l'hôtel de ville ainsi qu'aux remparts et aux portes de la cité, et des membres de la famille apparaissent encore plus tard dans des chantiers locaux. Une collection de portraits des maires de Reims est visible dans l'hôtel de ville.
Les Grandes Orgues du Salon d'Honneur, dites Orgue de la République, constituent un instrument rare, l'unique orgue conçu pour une mairie en France ; l'orgue Art déco, signé du facteur rémois Fortin — l'un des successeurs de la firme Merklin —, fut construit en 1928, mesure 9,50 mètres et comprend 19 jeux répartis sur deux claviers et un pédalier. Dès 1947, des signes de faiblesse apparaissent en raison d'une transmission électro-pneumatique peu fiable ; une tentative de restauration menée en 1985 n'aboutit pas et l'instrument est aujourd'hui en état de ruine.