Origine et histoire de la Porte de Mars
Porte de Mars
La Porte de Mars est un monument romain de Reims, daté du IIIe siècle, nommé d'après la proximité d'un temple dédié à Mars ; c'est le plus large arc du monde romain et il a été classé monument historique en 1840. Il est le seul des quatre arcs monumentaux qui marquaient les entrées cardinales de Durocortorum à subsister ; les autres étaient la porte Cérès (ou de Trèves), la porte Bazée et la porte de Vénus (ou de Soissons). Les derniers travaux archéologiques permettent de dater la Porte de Mars au premier quart du IIIe siècle. Construit pour témoigner de la grandeur de la ville sous le Haut-Empire, l'arc est intégré au IVe siècle dans l'enceinte, devenant l'un des quatre accès de la cité et marquant l'entrée nord sous le nom de porte Mars. Vers 1228, il est inclus dans le château des archevêques ; lors de la reconstruction du rempart au XIVe siècle, ses arcades sont bouchées et une nouvelle porte avec pont-levis est alors établie 100 mètres plus à l'est, fonction qu'elle conservera jusqu'au démantèlement du rempart au milieu du XIXe siècle. Le château des archevêques est détruit en 1595 sur ordre d'Henri IV ; la Porte de Mars est partiellement dégagée en 1677, redécouverte en 1816, totalement dégagée lors du démantèlement des remparts en 1844 et restaurée en 1854.
L'arc mesure 33 mètres de long, 13 mètres de hauteur actuelle — son entablement sommitale ayant disparu — et 6,40 mètres d'épaisseur ; il est constitué de trois arches bordées de piles ornées de colonnes. Entre les colonnes, la décoration comportait des niches à frontons triangulaires surmontées de médaillons à têtes en haut-relief, aujourd'hui très dégradés sauf sur la partie ouest reconstituée en 1854. L'intrados des voûtes, fortement altéré, présente néanmoins une représentation rare d'une moissonneuse faisant partie d'un calendrier des travaux des champs illustré par une série de médaillons montrant laboureurs, vendangeurs, moissonneurs, meunier, et autres activités agricoles. Sous l'arcade ouest, un médaillon carré représente la louve allaitant Romulus et Rémus, entourés du berger Faustulus et d'Acca Larentia, scène interprétée comme un rappel de la filiation entre Reims et Rome et liée à la légende locale attribuant la fondation de Reims à Rémus ou à ses compagnons. Sous l'arcade est, très abîmée, subsiste une représentation de Leda et de Zeus sous la forme d'un cygne, et au sol de l'arcade centrale sont visibles les sillons creusés pour guider les roues des véhicules. Contrairement à une idée répandue, la Porte de Mars n'est pas un arc de triomphe au sens romain du terme : les arcs de triomphe étaient réservés à Rome, les autres arcs antiques étant en réalité des monuments d'entrée.
La conservation de la Porte de Mars doit beaucoup à son emmurage dans l'enceinte du château au XIIIe siècle. À l'occasion du démantèlement du rempart engagé en 1840, Prosper Mérimée intervient pour sa sauvegarde et Narcisse Brunette reconstitue en 1854 le pilastre ouest ; des restaurations et consolidations sont ensuite réalisées aux XIXe et XXe siècles, parfois maladroitement, puis des travaux de restauration scientifique importants sont menés par les Monuments Historiques en 1983-1984. Un arbre et une plaque installés à proximité commémorent les soldats ayant servi en Orient et Alexandre de Serbie pendant la Première Guerre mondiale. Une nouvelle campagne de restauration, lancée en juillet 2015 et menée en plusieurs phases, a d'abord remplacé la couverture en béton du XIXe siècle par une couverture en plomb, ajouté un réseau d'évacuation des eaux et restitué l'architrave dans la continuité du fragment reconstruit au XIXe siècle ; une seconde phase, destinée à restaurer les parements et les décors, a été engagée en janvier 2023 pour une durée prévue de dix-huit mois. Les aménagements liés au tramway depuis 2011 ont ouvert une nouvelle perspective sur le monument, facilité son accès piéton et permis la mise au jour des ornières sous le porche et d'un aqueduc ; la réfection des Hautes-Promenades entre 2018 et 2020 a aménagé une large place devant la porte, la mettant davantage en valeur en attendant les prochaines restaurations.
Parmi les autres arcs gallo-romains de Reims, la porte Bazée, ou porte Collatice, était l'arc méridional, vraisemblablement semblable à la Porte de Mars et formant avec elle le cardo nord-sud ; intégrée à la ceinture fortifiée du Bas-Empire, elle perdit de son importance lors de l'élargissement de l'enceinte aux XIIIe et XIVe siècles, fut en partie démontée pour des adductions en 1753, et ses vestiges sont encore repérables rue de l'Université, un ensemble classé au titre des monuments historiques depuis le 30 janvier 1981. La porte de Vénus, ou porte de Soissons, était l'arc occidental situé place Myron-Herrick, en face de l'Opéra ; ses fondations monumentales ont été mises au jour lors des fouilles de 2007-2008 avant la construction du tramway, ses dimensions se rapprochent de celles de la Porte de Mars et sa construction est attribuée aux IIe ou IIIe siècles, et l'on a dégagé sous cet arc un égout voûté pratiquement intact. L'existence romaine de la porte de Cérès n'est pas encore attestée de façon certaine, mais la découverte de la porte de Vénus rend plausible l'hypothèse d'un quatrième arc sous l'actuelle esplanade Cérès.